Parthénogénèse par ANTHROPOVORE

Chronique et interview par Dory et Kevin Ritualist Paininyourneck

Mais qu’est-ce donc que cette Bête ?? Une immonde créature qui bouffe le monde bouchée par bouchée… Ce duo de Death/Black Metal, originaire d’Ile-de-France, est composé de Gevaudan (chant, guitare rythmique/lead, basse, drones et machines) et d’El Pradosaure (guitare lead, cris étranges). La Bête, d’abord cachée dans la forêt (album Rip and Tear), s’est rapprochée de la civilisation (Boogeyman) pour enfin muter et enfanter que l’on retrouve dans ce 3ème opus PATHENOGENESE / F(a)I(m)N, un double album produit par France Black, Death, Grind et sorti en février 2024. La Bête nourrit sa progéniture d’humains pervertis par notre société malsaine et obscure. Elle s’exprime au travers de Gevaudan et El Pradosaure.

Ne cherchez pas d’allégories dans cet album, le duo vous envoie la réalité en pleine face avec brutalité tant dans les textes que la musique. Il renferme également de belles surprises comme la participation d’Adsagsona (Houle) ou des titres de notre discographie française revisités.

C’est avec un plaisir non dissimulé que nous avons pu poser quelques questions à ANTHROPOVORE.

Merci à vous d’accepter de répondre à ces quelques questions.

Est-ce que vous pouvez présenter le groupe?

El Pradosaure : Tout d’abord merci beaucoup à toi de nous proposer cette interview à laquelle ça nous fait vraiment plaisir de répondre.

Anthropovore est un projet très sombre, nous l’alimentons avec nos émotions les plus noires, ce projet est né dans le but de nous délester de toute notre négativité intérieure, c’est notre thérapie et il faut croire que nous n’allons pas très bien, haha!!!

Le groupe est un trio composé de moi, El Pradosaure (guitare, bruitages et cris étranges), de Gévaudan (guitare, basse, chant, programmation et mixage) et puis vient la Bête!!!

La Bête est le troisième membre “fictif” du groupe, c’est un monstre qui a rejoint notre monde dans le but de manger l’humanité, et plus particulièrement votre humanité. Nous sommes ses dévoués apôtres et, à travers nous, elle exprime sa rage. Elle est une personnification de la misanthropie dans sa forme la plus pure.

La Bête est présente sur toutes les pochettes de nos albums et omniprésente dans la musique, les paroles mais aussi… sous vos lits !

Pour ce qui est de la genèse d’Anthropovore, avec Gévaudan, on opère depuis plusieurs années dans le groupe de death metal francilien Muertissima, un soir je débarque chez Gévaudan pour un apéro, j’avais le cafard et je lui proposais donc qu’on fasse un morceau de black metal old school. A partir de là, nous avions commencé à nous revoir plus souvent pour bosser sur ce projet, et un premier album nommé Rip and Tear est sorti en totale autoproduction.

Galvanisés par les nombreux très bons retours (alors que nous ne nous attendions à rien), nous avons décidé de composer un second album en upgradant la production.

Et là, l’opus Boogeyman est sorti chez le label Music Records.

Nous revoilà aujourd’hui avec un troisième double album intitulé Parthénogenèse / F(a)I(m)N signé chez le collectif France Black Death Grind !

Nous avons beaucoup travaillé sur ce double skeud, les compos atteignent un niveau de complexité supérieur de même que la production puisque nous avons fait masteriser les deux disques par Edgar Chevalier du Lower Tones Place Studio.

A noter aussi la présence non des moindres de la chanteuse Adsagsona du groupe Houle en guest sur cinq morceaux de Parthénogenèse.

Qui compose la musique et les textes au sein du groupe ?

El Pradosaure : La Bête, bien sûr !!! Nous ne faisons qu’exécuter ses ordres.

Si votre style musical était, sur le 1er album, très ancré Black Metal old school, comment définiriez-vous votre musique aujourd’hui ?

El Pradosaure : C’est très difficile à dire car nous ne bridons pas notre créativité.

Si à la base et dans l’esprit, Anthropovore est un projet ancré dans le black métal, nous ne nous interdisons pas d’expérimenter. On ne considère pas le home studio de Gévaudan comme tel mais plutôt comme un laboratoire de savants fous !

Alors pour ce qui est de ces deux derniers skeuds, franchement, on n’arrive même plus à savoir dans quelle case se ranger, haha !

Disons qu’on fait du blackened progressif ….

Vous chantez en français, est-ce important que l’on puisse comprendre vos messages ?

Gévaudan : Pour tout vous dire, dès lors que j’eus commencé à écrire des textes depuis le mal être de ma pré-adolescence, j’ai toujours souhaité que tout soit noyé, que le message reste cryptique et que seul le vague son de la voix transparaisse dans des miasmes de saturation exacerbée.

Je n’ai commencé à chanter en Français que très récemment. A partir de là, j’ai été totalement séduit par le fait de faire comprendre mes messages, étant donné que d’une façon générale, j’écris beaucoup mieux qu’avant !

La compréhension est importante, car celui qui écoutera notre musique pourra la vivre d’autant mieux.

La seule ambiguïté qui va persister est la suivante : est-ce que je pense vraiment ce que je dis, en tant que membre actif et productif de la société ?

Il faut aussi noter cette moitié de titre en espagnol (c’est bien légitime avec Muertissima !!!), pourquoi alors sur ce titre ? (Castigo / Parthénogénèse)

El Pradosaure : Ce titre conte une sorte de possession démoniaque. C’est un hommage à une de mes défuntes grand-mères qui parlait Espagnol et était très croyante.

Quand j’étais enfant, elle me mettait en garde contre le diable avec des phrases telles que : « Esteban, ten miedo del diablo porque está en todas partes. Ora a Jesús y pídele que te proteja ».

J’étais déjà athée quand j’étais gamin, mais ça m’a tout de même marqué, elle croyait en ces choses avec tant de ferveur que c’en était vraiment flippant. Je pense qu’une partie de mon aversion envers toutes les religions vient précisément de là.

Gévaudan : Je maîtrise l’espagnol autant que je maîtrise le Japonais. Lorsque l’on me demande si je sais traduire telle ou telle phrase, je réponds “est-ce que la bite du Pape rentre dans un donuts ?”. La réponse évidente est : “je n’en suis pas certain”.

Mais je finis toujours par écrire en Espagnol sous l’impulsion d’un Stéphane extatique, avec le maigre savoir que même ma prof d’Espagnol super canon n’a pas su m’inculquer jusqu’au bout au collège.

Parthénogenèse est votre 3ème opus, double album de surcroît ! Le fil conducteur de votre discographie est La Bête qui se nourrit d’humains. Comment l’avez-vous fait évoluer ? Parmi la populace, qui est au menu sur Parthénogénèse ?

El Pradosaure : Sur ce troisième album, la Bête a beaucoup grandi, et il s’avère qu’elle est capable de procréer par parthénogenèse (faculté de pouvoir se reproduire sans mâle, la Bête l’aurait mangé de toute manière, rendant la chose compliquée).

Maintenant, son infâme progéniture affamée profite des énormes garde-manger que sont les villes humaines, ne faisant aucune distinction dans le choix des proies bipèdes.

Gévaudan : Ouais, tout le monde dans le même panier… De courses.

Quelles sont les thématiques de l’album ? Racontez-nous comment JJ Goldman, Billy The Kick, entre autres, ont-ils pu vous inspirer ? Quelles sont vos autres influences ?

Gévaudan : Goldman, c’est pour “Transmigre-moi”. L’origine de ce titre est assez amère à mes yeux aujourd’hui, donc je ne m’étalerai pas sur sa signification profonde. En revanche, ce que je peux dire, c’est que le riff mid-tempo de fin est directement inspiré d’un ancien tube de l’été (ne me demandez pas quelle année, je n’en sais foutre rien). Et, lorsque vint le moment d’écrire les paroles, j’ai eu soudainement “envole-moi” de Goldman dans la tête. Ainsi ai-je décidé de prendre ses mots à contresens !

Pour ce qui est de Billy Ze Kick, j’ai littéralement enregistré les riffs et le chant de ce morceau en étant complètement défoncé aux champis ! La référence / parodie à cette icône de la chanson française était donc plus que bienvenue.

Adsagsona, du groupe Houle, vous accompagne sur plusieurs titres de cet album (Notre Père, Parthénogénèse, Souffrir, Ternir, Mangez-moi). Comment vous est venue l’idée d’ajouter une voix féminine ? A-t-elle aussi participé à la composition de morceaux ?

Gévaudan : Je l’avais repérée grâce à une vidéo qui circulait sur Facebook, où on l’entendait enregistrer des voix pour Houle.

J’ai tout de suite été séduit.

Sa puissance vocale est incroyable pour sa stature.
A vrai dire, je voulais depuis longtemps une voix féminine avec laquelle cohabiter, d’une part pour des raisons commerciales évidentes, et d’autre part parce que je suis secrètement amoureux de Candice Clot depuis mes 16 ans.

Plus sérieusement, Adsagsona a participé à l’écriture des paroles de deux morceaux et est en guest sur cinq morceaux de Parthénogenèse, mais la collaboration n’a pas pu aller plus loin car Houle était alors en pleine ascension et il fallait qu’elle reste aux commandes de son précieux navire !

Nous lui souhaitons le meilleur pour la suite!

Est-ce que vous pouvez nous parler de F(a)I(m)N ?

El Pradosaure : Alors F(a)I(m)N est un concept-album puisqu’il s’agit d’un seul morceau de 32 minutes !

Cet OVNI est uniquement disponible sur support physique et est disponible via notre bandcamp ou celui de notre label France Black Death Grind.

On peut considérer que c’est une histoire hors série dans l’univers de la Bête.

Cette chanson relate notre fin. Celle de l’humanité, de notre espèce, qui sera due – selon nous – à un manque de ressources qui provoquera une famine mondiale.

Car oui, Anthropovore est un projet avec une sensibilité écologique très forte !!!

Attention toutefois, nous ne prétendons pas apporter des réponses ou dire que nous savons mieux qu’un tel ou un tel, nous ne nous posons pas en donneurs de leçons.

Nous faisons juste un constat personnel de l’état de notre monde et considérons que c’est une cause totalement perdue.
Notre seule véritable vision de la chose est : On est Baisé !!!

Notre extinction est inévitable et imminente et à chaque nouvelle naissance, à chaque fois que le nombre d’humains augmente, notre fin se fait plus proche.

Gévaudan : Nous avons enregistré cette chanson un peu “sur le pouce” suite à un défi lancé par notre nouveau label. Je vivais alors quelque chose de pas vraiment facile, personnellement. A cause de ça, l’enregistrement a été long et douloureux, car je sortais plus de riffs que je n’arrivais à en enregistrer, et maintenir un ensemble cohérent était un vrai film d’horreur. J’ai fini par opter pour une notion de “chapitrage” dans ce titre.

Et croyez-moi, lorsque l’on se sent autant comme une merde, c’est d’autant plus facile de se détester en tant qu’espèce toute entière. Les paroles sont donc venues à flots.

L’artwork a été réalisé par Macchabée Artworks. Que représente-t-il ? Vous avez un lien particulier avec cet artiste, quel est-il ?

El Pradosaure : L’artwork représente la Bête nourrissant sa progéniture avec un humain.

Le nid est fait dans des ruines, et au loin, on peut distinguer une ville en proie aux flammes.

Homo sapiens sapiens n’est plus l’espèce dominante de la terre c’est désormais une espèce menacée.

Macchabée Artworks est l’artiste derrière cette œuvre mais aussi derrière toutes les illustrations d’Anthropovore depuis sa création. Nous considérons qu’il fait partie intégrante du projet.

La communication est d’autant plus facilitée que nous sommes amis depuis de nombreuses années, Macchabée Artworks a été guitariste lead de Muertissima avant de se retirer pour se consacrer entièrement à sa famille.

Vous êtes un duo mais comment ça se passe en concert ? Qui vous accompagne et à quel poste ?

El Pradosaure : Et bien, en fait… Nous ne faisons pas de concerts, ça nous demanderait d’être vraiment beaucoup sur scène. Le studio nous offre la possibilité d’enregistrer un nombre illimités de pistes ainsi sur certains morceaux, il y a des parties où quatre guitares jouent simultanément.

Peut être qu’un jour il y aura des concerts d’Anthropovore mais ce n’est pas pour aujourd’hui.

Gévaudan : Il nous faudrait du matériel conséquent, ainsi qu’un batteur niveau tueur ultime, et ça nous demanderait à la fois une organisation millimétrée et beaucoup d’argent. Il faudrait aussi un deuxième chanteur, ou chanteuse, pour me seconder !

Mais comme le dit Stéphane, ce n’est pas pour tout de suite.

Quels sont les projets en cours ?

El Pradosaure : Dans le courant de l’année, un titre inédit sortira sur une compile réunissant de beaux noms de la scène black métal française, nous ne spoilerons pas plus !

Nous avons des idées pour plusieurs albums à l’avenir, la Bête n’a pas dit son dernier mot !

Le petit mot de la fin, un message d’espoir ou de ce que vous voulez dire aux lecteurs

El Pradosaure : Non, ne cherchez pas d’espoir dans Anthropovore, il n’y en a pas une seule once néanmoins sachez qu’on vous aime tous quand même

Gévaudan : Faites comme moi, dites non à la drogue ! … Au moins une fois.

Merci

Pour commander Pathénogénèse : Bandcamp ou France Black Death Grind Merch

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