Chronique de Nicolas Ulv Schweitzer

Véhémence ! Que le projet du guitariste et compositeurTulzcha a bien grandi depuis « Assiégé », leur premier opus.
Entouré désormais du célèbre Hyvermor (homme aux multiples projets, qui gère également le label Antiq Records) et du très efficace batteur autrichien Thomas Leitner, le groupe semble avoir trouvé à la fois le line-up et la maturité nécessaire pour produire un très grand album de black métal médiéval.
Avec un joli visuel qui donne le ton, les paroles en français dans le livret, tous les ingrédients sont réunis pour une immersion totale dans l’univers du groupe. Allons-y !
« Par le sang versé » le morceau d’ouverture est d’emblée un tube imparable. Mid-tempo avec gros souffle épique, batterie mitrailleuse, vocaux rageurs, chœurs sur le refrain, riffs qui tuent. La production est parfaite pour le style, ni trop propre, ni trop « sale ».
Et on en a pour une petite heure, avec quasiment tout du même tonneau messires !

« La Sorcière du Bois Lunerive » n’est pas mon morceau préféré, les chœurs et les vocaux écorchés d’Hyvermor ne sont pas aussi bien maîtrisés qu’ailleurs sur la galette. Mais les riffs géniaux demeurent, on reste totalement happé par l’ambiance, et comment ne pas succomber à ces mystérieuses incantations de sorcières sur fond de guitare acoustique…
De guitare acoustique, il en sera question également sur « L’étrange clairière Partie I », avec samples d’épées et instruments folkloriques.
Une respiration appréciée avant la partie II qui démarre en trombe, avant que des vocaux d’un grave sans pareille viennent narrer une nouvelle histoire fantastique sur un rythme lourd et pachydermique (du doom quoi !).
On a là encore droit à des accélérations, puis à un break folk avec une narration bien audible.
« La dernière chevauchée » commence là encore avec les locutions latines d’un « enchanteur ». On sent que ça va partir en furie… Et on est servi !
On pourra simplement regretter le chant clair sur ce titre qui sonne un peu « niais » à mon goût, mais rien qui vienne gâcher le plaisir, et l’exercice n’est pas simple. A noter que la dernière partie du morceau après le break (et les samples de chevaux au galop) est un vrai déluge de violence maîtrisée et épique avec là encore des chœurs pour couronner le tout.
Un peu d’air ? C’est parti pour « Le sous-bois, à trois lieues du château », un break acoustique mêlé d’instruments folk qui m’évoque ce que j’aime tant chez un groupe comme Empyrium par exemple. Ce genre d’interlude ne fait que vous immerger encore davantage dans cet univers duquel on n’a décidément pas envie de s’extraire.
On se dirige vers la fin de l’album avec « Passage dans les douves », une perle où rien n’est à jeter. Tous les ingrédients dont on a déjà parlé sont présents. Et ce break sublime avec ce riff et ce chant black/clair :
« Dans mon village, un fou courait les rues, griffant son visage, cherchant partout son bien perdu ! ».
Cette fois c’est parfaitement maîtrisé !
Et que dire du riff de la dernière partie… Tulzcha est une machine à riffs.

A ces tremolos s’ajoutent cette batterie très en avant de Thomas et la narration black presque compréhensible d’Hyermor. Cocktail jouissif. Sans doute le meilleur morceau avec le titre d’ouverture et l’interlude qui précède car tout y est parfait de bout en bout.
On termine avec « La fronde des anges », là encore une grande réussite. Vous connaissez tous les ingrédients maintenant…
Notons un final qui me rappelle beaucoup Bathory, notamment au niveau du rythme. Une conclusion parfaite.
Pratiquer ce style de black metal, dans sa langue natale et avec cette thématique, présente à mon sens les mêmes risques que de pratiquer de la musique gothique et romantique. A savoir que la limite qui sépare le sublime du ridicule est très fine.
Véhémence reste dans la première catégorie haut la main. Déjà une référence.
Autre album conseillé : Ordalies
Extrait « Passage dans les douves » :
