
Chronique de Myriam CHAZALON
Ah cher Sbuquienne et Sbuquien, nous voici rendus en chaude période estivale. Pour te rafraîchir un peu, Permets-moi de te dénuder… l’esprit bien sûr !
Point de roman noir, point de biographie plombante pour ton farniente sur la plage, pour ta sieste à la campagne ou pour ton repos à la fraîcheur de la montagne. Je te propose, lectrice et lecteur adorés une bande dessinée.
Bon, je t’avoue que cette chronique n’a pas été facile à écrire. Je ne résiste pas à l’envie de te narrer ici, la raison pour laquelle, cet article a bien failli ne jamais voir le jour. D’aucun trouveront cette anecdote truculente : un matin, fort appliquée à mon écriture, je fus détournée de mon exercice studieux avec une fourberie toute satanique.
Naïvement , j’étais venue m’enquérir, auprès de mes amis du SBUC, sur la pertinence de te proposer à la lecture ce genre de littérature imagée. Que n’avais-je pas fait là ?!!! Toi qui nous imagine autour d’une table en forme de pentacle, invoquant Lucifer grâce à notre maîtrise de la manipulation du oui-ja, afin qu’il nous guide dans nos prochains choix de groupes à chroniquer, sache qu’il n’en est rien, ou presque.
Ce matin donc, je me suis retrouvée au cœur d’une bataille rangée entre les fans de Tchoupi (le pingouin glam-rock), et les pro-Dora (qui cherche désespérément les walls de Jerricho avec sa put*** de carte).
Et moi, au milieu de cette guerre interne, qui tente de me concentrer sur la bd de Manara… Ah, Manara ? Tu as dressé… l’oreille. Tu te dis que tu vas te rincer l’œil, voire les deux. Tss-tss. Non, je ne vais pas chroniquer Le Déclic » ou « Le parfum de l’invisible ». Non, tu ne verras pas d’image de brunes plantureuses dans des positions qui feraient rougir Katsumi. Non, la bd que je vais te présenter n’est pas non plus une version pas très catholique des aventures de Pervers Tchoupi et Dora, qui porte bien son surnom d’exploratrice, la coquine.
Au risque de te décevoir, je te propose aujourd’hui, une autre facette de Manara qui sort de son costume de dessinateur érotico-pornographique pour enfiler (rhôôô!!) celui du chroniqueur historique. Mais Manara reste Manara, et il a tout de même opté de croquer un personnage sulfureux dont je vais te dresser un rapide portrait.

A la fin du XVIème siècle, dans une Italie puritaine, sévit un homme, assassin, débauché, qui se sert de son art pour se gausser de la religion. Mort à 38 ans dans des circonstances mystérieuses, ce génie de la peinture baroque, ce maître incontestable du clair-obscur n’a rien à envier aux vilains contemporains.
Milo Manara a donc choisi de nous raconter la vie de Michelangelo Merisi Da Caravagio, en deux tomes sortis respectivement en 2015 et 2018, superbement mis en couleurs par sa fille, Mlle Simona Manara.
Quand on est dessinateur, c’est ambitieux de s’attaquer à un peintre aussi talentueux que Le Caravage. Mais Manara, en maître du 9ème Art, a su faire monter le peintre sur ses planches. Et c’est un bonheur de voir Le Caravage prendre vie sous les crayons de Manara. Il est comme on l’imagine, rebelle, séduisant, bagarreur, hérétique…
Cette bd est vraiment le meilleur compromis entre biographie et roman, qui te permettra de découvrir ou re-découvrir l’indécent Caravage. Et surtout ,il y a une deuxième raison pour laquelle tu dois absolument te procurer ce dyptique pour cet été : oui, toi Lectrice qui est là sur ta serviette en bord de mer, ce beau blond aux regard doux derrière ses lunettes d’écailles , légèrement musculeux , barbe de quelques jours avec le magasine Connaissance des Arts sur son transat, oui, celui-là même ! Son regard sera naturellement attiré par le titre de ton ouvrage, et autour d’un feu de camp, vous dégusterez un virgin mojito les yeux rivés sur le coucher de soleil.
Ou toi lecteur, intéressé par cette brune tatouée légèrement couverte par un bikini noir que Manara ne laissera pas indifférente vu son intérêt pour la littérature olé-olé (oui, même si tu n’es pas en Espagne), qui se laissera conter fleurette quand la sombre nuit tombera, sirotant un Black velvet au doux son de Mayhem.
Ainsi, en lisant cet ouvrage, tu gagneras Lecteur, Lectrice, sur les deux tableaux.
Le Caravage – La palette et l’épée (Milo Manara) Éditions Glénat 2015.
Le Caravage – La grâce (Milo Manara) Éditions Glénat 2018.
