Chronique écrite par Myriam CHAZALON

Cartographie des ecchymoses… Le titre a déjà de quoi m’intriguer…. Et tu me connais bien maintenant Sbuquienne, Sbuquien : si on m’intrigue, je m’engouffre.

Cartographie des ecchymoses… Martin K. me promet un voyage au pays de la Souffrance, me propose de visiter des lieux de douleur des corps, des esprits. Suivre de mes doigts fébriles les reliefs d’une terrible affliction.

Je ne résiste pas à la tentation, en guise de préliminaires, d’effleurer la couverture ; de m’imprégner de son atmosphère que je pressens noire, terrible. Il va me falloir appréhender les mots, apprivoiser les maux.

Oui, j’ai cheminé dans l’univers de Martin Koppe. J’ai été le voyeur silencieux de cet huis-clos charnel. Je les ai épiés jusqu’aux portes de leur folie. Que dis-je aux portes ? Je les ai observés jusque dans l’antre complexe de l’âme humaine dans ce qu’elle a de plus torturé, où chacun des personnages marche sur le fil du rasoir, et… s’y coupe, profondément. Si profondément que leurs entailles physiques et psychiques m’ont vite semblé inguérissables.

Cartographie des ecchymoses, c’est le récit d’une rencontre où la haine est à la hauteur de l’amour. Tu sais, cette jouissance si particulière, ce plaisir si singulier que l’on peut ressentir au seuil de la douleur : quand tes reins brûlent de désir, quand une fessée claque sur la peau charnue de tes fesses, quand des ongles s’enfoncent dans ta chair, quand des dents se plantent dans ton omoplate …. Non, tu ne sais pas car tu n’es pas maso toi !! Mais, ce n’est en aucun cas de relations BDSM qu’il est question ici. C’est bien plus profond, plus malsain, plus sournois.

Car cette cartographie des ecchymoses ce n’est pas une histoire de relations sexuelles déviantes et consenties, mais du sexe qui devient déviant, une expérience qui tourne mal, une proposition qui vire au jeu pervers, une offre qui diverge.

Martin Koppe a l’art et la manière d’appuyer là où ça fait mal, sur les bordures violacées de l’ecchymose. L’écriture est subtile, intensément intelligente, chaque mot est à sa place, chaque phrase fait mouche. Si tu as, lectrice, lecteur, la moindre fibre de sapiosexualité en toi, tu vas vite le savoir, et ce roman est foncièrement pour toi. Il happera un peu ton corps et beaucoup ton esprit, il jouera avec toi. Moi, je n’ai aucunement honte d’avoir pris du plaisir à lire ce supplice des autres car c’est bien au-delà du tourment, c’est le véritable abandon, la perte de contrôle ultime…. Tout cela confère de la noblesse aux actes des protagonistes.

Ose aller te frotter aux ecchymoses, même si ça fait mal, le plaisir est au bout du chemin, je te promets, je t’y attends.

Je tiens à remercier ici Thomas Ponté (dont on t’a déjà parlé ici aussi) qui m’a conseillé de me plonger corps et biens dans la lecture des romans de Martin Koppe. C’est aussi cela la famille Satan Bouche Un Coin, et c’est en partie pour cela que je l’aime.

Cartographie des ecchymoses- Martin Koppe

(Excellentes) Editions Astrobelarra – Le Grand Chardon – Collection Mozaïk

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