Chronique écrite par Nicolas Ulv Schweitzer

Tout a été dit sur Windir. Projet fabuleux d’une seule personne ou presque, dont le décès accidentel n’a fait que renforcer le mythe. L’homme est en effet mort d’hypothermie en 2004, piégé dans une tempête de neige en pleine nature, à seulement 25 ans. Lorsqu’on a tant célébré les grandes épopées et les contrées glaciales, cela a tout d’un destin tracé.
Valfar, l’homme dont on parle ici, est encore adolescent lorsqu’il forme Windir. Après un premier album de très bonne facture en 1997, il publie Arntor en 1999, toujours seul aux manettes. Cela changera d’ailleurs sur les deux albums suivants, son projet se transformant progressivement en véritable groupe.
Après une introduction folklorique et guerrière, l’album démarre sur « Arntor, ein windir » devenu un classique du groupe. Claviers et guitares qui s’entremêlent, batterie mitrailleuse, chœurs guerriers, vocaux déchirés et haineux, break d’anthologie, arrangements sophistiqués… Tout y est ! Les cris folkloriques de Valfar sur ce morceau me rappellent ceux de Knajz Varggoth de Nokturnal Mortum à l’époque de Nechrist.

D’ailleurs, le parallèle avec ce groupe et la scène d’Europe de l’Est en général ne s’arrête pas là selon moi : l’usage d’instruments eux aussi folkloriques constitue un autre point commun et cet album en est truffé. On y entend même de l’accordéon, ce qui est tout à fait étonnant (et osé !) pour l’époque.
L’ensemble de la galette forme un tout très cohérent, les morceaux et les ambiances diffèrent et on ne s’ennuie jamais. On se sent à certains moments portés vers les hauteurs (façon Emperor), à d’autres, c’est le côté épique qui domine (on ne peut s’empêcher de penser à Bathory pour le côté « saga nordique »), et parfois une infinie tristesse semble ressortir des compositions comme sur le superbe « Kong Hydnes Haug ».
Et comment ne pas citer les pièces, longues et grandioses, que sont « Saknet » ou « Svartesmeden Og Lundamyrstrollet »…
Cet album transpire la Norvège, et plus précisément la vallée de Sogndal dont est originaire le jeune homme.
On pourrait se dire que le côté mélodique, folk et épique qui suinte de cet album en fait quelque chose d’accessible. Détrompez-vous !
Même pour l’oreille initiée, écouter Windir en dilettante risque de vous faire passer à côté de l’essentiel. La richesse des compositions réclame un minimum d’attention et d’investissement.

Les détracteurs de l’œuvre diront qu’il s’agit de bouillie sonore sans malheureusement jamais s’interroger sur leurs propres limites.
D’autres trouveront que certaines longueurs auraient pu être supprimées.
Sans parler de ceux qui reprocheront aux synthés un côté « cheap », le même genre de reproche qu’on peut lire à propos de Summoning ou du « Dunjeon Synth » en général.
Ne vous arrêtez pas à ces caquètements et plongez-vous dans ce monument intemporel.
Vous sentirez alors la neige sous vos pieds, le vent s’engouffrer dans la vallée, les drapeaux qui claquent, les cors qui sonnent, les épées et les armures qui s’entrechoquent…
Autre album conseillé : 1184
