Chronique écrite par Myriam CHAZALON

Chers SBUCienne et SBUCien, maintenant qu’on se connaît un peu toi et moi, j’ai décidé de te faire entrer dans mon intimité – Toi, derrière ton bureau, je te vois avec ton sourire en coin et tes pommettes rougissantes (d’ailleurs, tu n’as pas un compte-rendu à finir toi ?- Vraiment, tu n’en branles jamais une !! Et là, crois moi, ça ne va pas durer !!)- Je te parlais de mon intimité littéraire, bien sûr !

Il me tient à cœur de te faire partager une petite pépite. Viens, suis-moi… Regarde-là ! Sade, Choderlos de Laclos, Cleland, Bukowski, Breton…. Tu ne vois pas, le tout petit livret ?  Regarde mieux, la couverture est déjà une aventure : ça ne te rappelle rien ? L’ambiance, la typographie…. Nous voici, dis-tu dans une énième parodie d’Indiana Jones…. Hum, hum, observe bien : Satan se cache dans les détails.  Si pastiche il y a, elle rime alors avec grosses miches car il est bien question, ici, d’une plongée immersive dans un univers érotico-pornographique  à la Barbarella peuplé de créatures lovecraftiennes .Et c’est avec un plaisir non-dissimulé que je me suis glissée dans la peau de cette jeune et innocente paléo-linguiste qui se lance à la recherche du temple et de ses plaisirs interdits (elle ne va pas être déçue la pauvrette, et toi non plus du coup (de boutoir bien entendu…)

Ce fascicule d’une vingtaine de pages reprend tous les codes des « livres dont vous êtes le héros » qui ont occupé bon nombres d’après-midis de beaucoup d’ados: il faut te munir, comme le mentionne la quatrième de couverture, d’ « une pièce de monnaie, un crayon et un paquet de Kleenex ». Le ton est donné. Bien entendu, je ne te dévoilerai rien de ma propre aventure, si ce n’est que, j’ai fait des choix qui m’ont conduit pour certains vers la (petite ?) mort.

Les petits chapitres qui doivent faire l’objet de ton élection (oui, avec un L à élection) sont perversement illustrés par l’artiste avignonnaise Brouette Hurlante (re-baptisée Brouette Gluante car l’occasion fait la laronne). Du noir et blanc, enchevêtrement de lignes épaisses et fines, explicites mais dont nos yeux scrutent le moindre détail pour ne pas en perdre une miette, en s’assurant à tâtons que le mouchoir est à portée de main quand même.

Tu l’as compris, c’est un coup de cœur et j’ai voulu en savoir un petit peu plus sur l’artiste et ses motivations. Et c’est un samedi soir, en pleine préparation de son omelette-soja-fromage frais et sa salade d’endives, de pommes et de noix, qu’elle a bien voulu répondre à mes questions qui étaient à la noix elles aussi. Il faut savoir que notre Brouette avignonnaise (oui, ça sonne comme une position du kamasutra provençal, mais c’est à dessein), n’est pas une illustratrice illustrement inconnue : elle sévit depuis de nombreuses années dans le magazine Metal Hurlant, dont elle tire son bruyant pseudo (mais ça, c’est une autre histoire).

Elle m’a raconté l’origine de cette idée d’écriture : L’envie un peu folle de faire une collaboration avec Shadow, son « chair est tendre » qui n’évolue pas quant à lui dans le milieu artistique, petit défi donc. Elle a voulu également présenter au public un travail qui sorte de l’ordinaire de l’écriture purement féminine, et ouvert à toutes et tous (adultes s’entend !) loin des clivages de genre : un côté super kitsch décomplexé où chacun peut laisser de côté son identité et jouer un personnage sans tabous. Bercée par les superbes illustrations des livres dont vous êtes le héros, elle leur rend ici un vibrant hommage.

Elle qui aime Nicollet et Metal Hurlant, elle a su tirer parti de ses influences pour créer son propre univers. Aujourd’hui, elle fourmille de projets : Emmener une nouvelle fois son fanzine aux Fauves d’Angoulême et remporter le prix, mener à bien des projets collaboratifs avec d’autres artistes, continuer à la vie à la mort avec Metal Hurlant et finaliser son envie de bouquin.

Je resterai bien encore un peu avec toi, mais j’ai la nette impression que tu t’impatientes, puisque je te vois là, les yeux hagards, ton crayon à la main, ta pièce et ton rouleau de Sopalin prêts pour leur inavouable utilisation ! Je te laisse donc jouir en toute quiétude de ces 20 pages.

Suivez l’artiste sur Instagram : https://www.instagram.com/brouette_hurlante?igsh=Nm9vaW0wYnJpNHBp